05. Santa Teresa

Vous venez de traverser le Largo da Carioca, échappant de justesse aux autobus rugissants qui, tels des monstres aveugles, se ruaient sur vous. Tout tremblant encore et gardant le souvenir de leur haleine pestilentielle, vous vous installez, poussant un soupir d’aise, dans la baladeuse d’un vieux tramway qui compte certainement plus d’un demi-siècle. ​

Le conducteur siffle le signal de départ, et vous voilà emporté, transporté, cahotant et brinqueballant. En un instant vous dominez Rio. Le tram passe le viaduc qui enjambe la rue da Lapa. Les toits de la ville s’étalent à vos regards. L’humanité suante et grouillante s’agite sous vos pieds.

Détendu et rafraîchi par une légère brise qui vient de la baie où la mer scintille sur un fond de montagnes brumeuses, vous vous tournez vers vos compagnons de voyage. Un vieux couple nettement britannique voisine avec une imposante négresse. De sportifs jeunes gens coudoient des dames à cheveux blancs très strictement habillées. Prêtez l’oreille, on parle allemand, français, anglais, italien, et même portugais.

Le tramway s’élève le long de la pente. Le tintamarre de Rio s’assourdit. L’air est plus léger. On passe entre de vieilles maisons basses et de superbes palais enfouis au milieu d’une exubérante verdure. Le tram éveille de ses grincements les petites rues provinciales.

Vous êtes à Santa Téréza.