09. Le long des quais

J’aimais flâner le long des quais aux heures chaudes. Les cargos portaient des noms exotiques ou familiers. Ils balançaient à la houle du canal cependant que, penchés au bastingage, les matelots me jetaient un regard indifférent.

Parfois, je montais à bord, humant avec délice l’odeur du navire: huile chaude des machines, relents de cuisine, désinfectant, cocktail, plus grisant que tous les alcools du monde. J’imaginais des fuites impossibles aux lointains horizons.

Mais bientôt, le mugissement de la sirène m’arrachait à mes rêves. II fallait redescendre à terre. Alors, m’installant sur une caisse recouverte d’inscriptions magiques, je regardais s’affairer les hommes d’équipage. Les cabestans grinçaient. On larguait les amarres qui tombaient sur l’eau en claquant. Lentement le bateau s’éloignait du quai, cependant que les mouettes et les cormorans glissaient au milieu d’un entrelacs de cordages.